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France : la Cour de cassation annule le procès en appel d'Yvan Colonna

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Publié le 1er juillet 2010
C'est un « séisme » qui s'est produit, hier, dans l'institution judiciaire, du moins pour l'observateur lambda. La Cour de cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'assises de Paris condamnant Yvan Colonna à la réclusion criminelle à perpétuité avec une peine de sûreté de 22 ans. Le berger corse avait été reconnu coupable de l'assassinat du préfet Claude Érignac, par la cour d'assises spéciale. À la différence des autres juridictions d'assise, le jury n'est composé que de magistrats professionnels. Cette cassation a pour effet immédiat d'annuler tous les effets de la condamnation. Yvan Colonna sera donc jugé une troisième fois pour les faits qui lui sont reprochés.

L'article 331 du CPP en question

L'article 331 du code de procédure pénale

Les témoins déposent séparément l'un de l'autre, dans l'ordre établi par le président.

Les témoins doivent, sur la demande du président, faire connaître leurs nom, prénoms, âge, profession, leur domicile ou résidence, s'ils connaissaient l'accusé avant le fait mentionné dans l'arrêt de renvoi, s'ils sont parents ou alliés, soit de l'accusé, soit de la partie civile, et à quel degré. Le président leur demande encore s'ils ne sont pas attachés au service de l'un ou de l'autre.

Avant de commencer leur déposition, les témoins prêtent le serment « de parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité ». Cela fait, les témoins déposent oralement. Le président peut autoriser les témoins à s'aider de documents au cour de leur audition.

Sous réserve des dispositions de l'article 309, les témoins ne sont pas interrompus dans leur déposition.

Les témoins déposent uniquement, soit sur les faits reprochés à l'accusé, soit sur sa personnalité et sur sa moralité.

Lors de l'audience publique de la chambre criminelle, l'avocat général avait conclu au rejet du pourvoi. La formation de jugement n'a pas suivi l'intéressé en prononçant l'annulation du procès d'assise. Ne jugeant que le droit, la Cour de cassation a fondé sa décision sur un vice de procédure soulevé par les avocats de la défense lors du procès d'appel. Ce moyen est tiré de la méconnaissance de l'article 331 du code de procédure pénale qui pose le principe suivant : « les témoins ne sont pas interrompus dans leur déposition. » Lors de l'audience d'appel, la défense avait cité Monsieur Mannarini en tant qu'expert. L'intéressé est retraité, et a produit une étude balistique détaillée à la demande de la défense. Dans son rapport, il énonçait clairement que les coups de feu mortels sur le préfet Érignac ont été commis par une personne mesurant 1 m 85. M. Yvan Colonna ne mesurant que 1 m 71, ces conclusions ont provoqué l'énervement de l'avocat général et des parties civiles.

Lors de l'exposé de M. Mannarini, les parties adverses ont voulu le décridibiliser en mettant en doute ses compétences en balistique. Bombardé de questions avant même qu'il ait pu terminé son exposé, l'expert de la défense avait manifesté son agacement devant la cour. L'audience a été interrompue puis le témoignage avait repris le lendemain matin. La défense avait porté à la connaissance du président que les prescriptions de l'article 331 du CPP avaient été méconnues.

Selon Me Ludovic Pinto, avocat au Barreau de Lyon, l'arrêt rendu constitue tout sauf « une surprise pour les spécialistes de la cassation en matière pénale. » Dans plusieurs billets, il note le coup de maître de la défense d'avoir réussi à provoquer un tel vice de forme. Dans toute affaire d'assise, les chausse-trappes sont nombreuses dans les procès d'assises et se multiplient lorsque l'affaire devient complexe.

En revanche, le taux de cassation en matière pénale n'est que de 5 % contre 25 % en matière civile. « en matière pénale, la chambre criminelle de la Cour de cassation a pour politique de ne censurer qu'avec parcimonie les décisions des juges du fond, » note Me Pinto. Il devient rarissime en procès d'assise.

Des réactions très contrastées

Croquis d'Yvan Colonna

La défense a accueilli avec satisfaction, la cassation de la condamnation d'Yvan Colonna. « C'est la première marche vers la consécration de son innocence » a notamment déclaré Me Pascal Garbarini. « Ce n'est pas seulement la victoire d'Yvan Colonna, c'est aussi la victoire du droit. La Cour de cassation a rendu une décision difficile dans une affaire sensible » ajoute Me Patrice Spinosi.

En revanche, le choc a été rude pour la veuve du préfet Érignac : « Cette décision ne concerne qu'une minime chose pour moi, pour un sujet d'une importance extrême » s'est-elle exprimée sur Europe 1. S'estimant prête d'affronter l'épreuve, « Je le ferai avec mes enfants et là, je serai plus combative qu'aujourd'hui où je suis quand même un peu assommée », a-t-elle ajouté.

Michèle Alliot-Marie a, pour sa part, manifesté sa sympathie à l'égard de la famille Érignac qui « a attendu pendant de nombreuses années que la justice soit rendue. » « Cette décision ne porte en rien sur la question de fond de la culpabilité d'Yvan Colonna, » a-t-elle ajouté, égratignant au passage la présomption d'innocence. Cette nouvelle déclaration ne manquera pas être relevée par les avocats d'Yvan Colonna.

La presse corse ne fait pas dans la dentelle pour commenter la décision de justice. Le quotidien 24 Ore in Corsica publie à la Une « Sarko, giflé et cassé. » avant de consacrer les trois pages suivantes sur l'affaire.

Sources


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